Je rentre chez moi, il fait bon et nuit.
 Je longe le canal bordé de groupes d'amis qui jouent de la guitare en pique-niquant, d'amoureux qui regardent les reflets des lumières violettes dans l'eau et ceux des guirlandes de fête des petits magasins de couleur sur le bord, d'hommes seuls qui éffritent du shit, de sacs de couchage remplis de gens dormant dehors (à l'aller, ils tissaient des tapis), de gens sur les bancs, de gens sur la rampe métallique qui longe l'eau, de canettes vides qui flottent (Qu'est-ce qu'il peut bien y avoir au fond de l'eau? Est-ce qu'il y a des canettes pleines rongées par la rouille qui laisseraient échapper doucement de la bière que les poissons boiraient? Est-ce qu'il y a des vieux godillots fendus, comme dans les dessins animés ou quelqu'un de noyé attaché à un parpaing?... )
Elle a une robe en voilage rayé toute légère et elle passe sur un vélo de fille. C'est un vélo de fille parce qu'il a la barre parallèle au cadre et un panier devant le guidon.
Plein de gens jeunes et brillants sont attablés à la terrasse des cafés chics, ils sont beaux, ils ont des lunettes, ils se tiennent droits, ils discutent de sujets importants, tendances, philosophiques, ou de problèmes qu'ils ont et qu'ils prennent au sérieux, ils rient fort, ils dévisagent les gens qui passent ou les ignorent, ils paient leur sandwich 7€50.
J'entre dans le jardin, il fait bon, il y a un grillon, je cherche une luciole des yeux... Peut-être pas quand même. Je reçois une goutte, un pull en train de sécher sur un balcon. Ca sent l'herbe coupée, les impatients, la terre. Je reste un moment sous l'arbre pour respirer. Sur la porte vitrée il y a un petit mot. Ce soir on a dit une messe à la mémoire du concierge décédé l'an dernier.

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