Je suis dans le métro. Il fait chaud. Au fond de la rame, un couple. Ils sont jeunes et métis. L'homme est grand et costaud, il porte un tatouage tribal autour du biceps, on le voit juste en dessous de la manche de son T-shirt. La fille est très belle. Grande, des cheveux très noirs, un visage fin, une peau ambrée, elle porte un corsage blanc et une jupon long, blanc aussi. On devine que ses seins sont petits et fermes. L'homme a l'air de revenir de voyage. La fille lui sourit de temps en temps mais semble plutôt distante.
A côté de moi, assis sur l'un des sièges pliants, un homme jeune. Il est arabe; il a un visage fin et harmonieux. Il regarde droit devant lui, peut-être la belle fille. Ses cheveux sont ras, on peut voir quelques cheveux blancs parsemés ça et là sur sa tête. Il a une fine moustache et un bouc.
Une station. Deux filles entrent dans la rame. L'une d'entre elle a une coiffure qui ne lui va pas. Elle minaude en discutant avec sa copine. En face de moi, il y a un homme d'une quarantaine d'années, peut-être cinquante. Il a des cheveux d'un blond clair, le teint rouge. Il me regarde et esquisse un sourire. Je ne répond pas. Je détourne les yeux vers deux autres filles qui viennent d'entrer. Elles parlent anglais. Elles sont américaines. L'une des deux a un haut rouge brique ample d'une coupe originale avec des manches asymétriques et une mini-jupe en jeans éfilochée. La deuxième a des cheveux trop raides pour être naturels, elle mange un sandwich.
Debout devant moi, un homme châtain d'une trentaine d'année, il porte un bermuda. On voit deux veines qui ressortent sur son mollet droit, de futures varices. L'une d'elles se replie sur elle même à la manière d'un lacet de montagne. Il porte une alliance en or à l'annulaire gauche.
Je regarde les annulaires gauches des autres hommes de la rame. Je n'en vois aucun orné d'une bague.

Station Châtelet. La rame se vide un instant pour se remplir aussitôt. Une fille très pâle avec de drôles de lunettes blanches. Une autre avec un faux air d'Elodie Bouchez : une coiffure très tendance avec une frange très droite et très raide, une veste en velours noir avec un badge du PMU sur une blouse verte et très échancrée laissant deviner la naissance de ses seins un peu tombants sans soutien-gorge. Une femme avec une petite fille en robe à smocks bleu vif. Un homme avec le regard un peu perdu, des sandales, un peu écrasé par la fermeture des portes...

Les Halles. Je descends en même temps qu'une foule. Comme à chaque fois je suis un peu perdue. Je marche au hasard. J'ai envie de regarder s'il y a des manteaux de mi-saison car le mien est trop râpé pour être mis une année de plus. Je fais quatre ou cinq magasins de fringues. Il n'y a que des manteaux d'hiver. Avec cette chaleur, ça ne donne pas envie. Je regarde du côté des T-shirts. Une meute de filles s'accumulent là où je veux atteindre un T-shirt ample avec un col en V à 6€50. J'arrive à l'attrapper. Il y a ma taille. Je n'ai pas envie de l'essayer, il y a trop de monde en cabine. En plus le tissus est de mauvaise qualité. Pas étonnant à ce prix. Je laisse tomber. Je commence à en avoir marre de la foule. Je monte un étage. Je vais voir les magasins de décoration et d'articles pour la maison. Peut être qu'ils auront un pilon. Oui ils en ont. Le moins cher est à 34 € et il ne peut être vendu sans le mortier. Je laisse tomber. J'achète plutôt un gant rembouré pour le four car le mien est troué et je me crame un doigt à tous les coups.
Le caissier est effiminé, il parle en zozotant légèrement. Il propose au client qui me précède de remplir une fiche de renseignements pour recevoir des réductions à domicile. Le client refuse. Lorsqu'il me propose, j'accepte tout en sachant que je me fais avoir. le caissier me dit "la personne avant vous a refusé, il ne sait pas ce qu'il perd!!".
Je sors, je reprends le métro. La rame est bondée. J'ai chaud et j'ai faim. Je descends à ma station. Dans l'escalator, l'homme devant moi se retourne, me regarde et me souris. Une fois, deux fois, trois fois. En haut de l'escalator, je prends la direction opposée à la sienne. Je marche jusqu'au marché couvert pour acheter de la menthe et du citron vert. Je fais un tour. Ca sent un peu la viande faisandée et le poisson. J'ai envie d'acheter du filet de thon mais je ne préfère pas avec cette chaleur. Je demande à l'étal d'un marchand de fruits et légumes s'ils vendent de la menthe. Ils la gardent dans un petit frigo. Je leur prends 4 citrons verts et m'aperçois trop tard qu'ils sont presque 1€ plus cher du kilo qu'à côté. Tant pis, c'est pas grave. Je cherche la monnaie. Normalement le caissier efféminé m'a rendu un billet de 5€. Je ne le trouve plus. J'ai dû le perdre ou oublier de le prendre quand j'ai rempli la fiche. J'ai 10€. En sortant, un jeune homme qui fait la manche me dit bonjour. Je lui réponds "Bonjour". "Comment vas-tu?"me demande-t-il. Je me retourne, je lui dis "Bien!" avec un sourire.
Je vais jusqu'au supermarché. Sur le trajet, je pique un prospectus coincé dans l'essuie glace d'une voiture. Une annonce pour des cours de chant pas très loin. J'appelerai, depuis le temps qu'il faut que je m'y remette. Au supermarché, je rachète les mêmes prunes noires qu'avant-hier. Elles étaient sucrées et juteuses. J'achète deux bouteilles de Perrier, des biscuits apéritifs et je tourne dans le magasin pendant 10 minutes sans trouver le sucre. Enfin je le repère. Du sucre roux ou blanc? Je crois qu'il faut du blanc.
Je rentre chez moi. Un cycliste arrêté à un feu rouge me regarde passer et me lance un sourire resplendissant de dragueur invétéré. Je me demande en moi-même ce qui se passe aujourd'hui car je suis mal coiffée, pas maquillée, j'ai des cernes, un T-shirt froissé, une jupe, oui mais une jupe froissée, plutôt longue et pleine de poils de chats...
Chez moi, il fait bon, je vois les feuilles des arbres à travers la fenêtre ouverte. On entend de la musique... une musique étrange qui vient du voisinage. Je me dis que c'est agréable, il doit y avoir une école de musique dans le coin parce que souvent j'entends une femme qui fait des vocalise, un tuba, une clarinette ou un piano.

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